Quelques pierres dans mon jardin.

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Mr Mick
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Joined: Sun Dec 28, 2003 1:00 am
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Post by Mr Mick »

Voici le début d'un livre que j'ai commencé à écrire il y a déjà quelques années.
J'attends vos commentaires...

QUELQUES PIERRES DANS MON JARDIN

1.
C'est étonnant comme quelques mots peuvent suffire. J'avais tant en attente. Il ne manquait donc qu'une étincelle. Ce soir enfin, le crayon glisse sans résistance, juste celle qui fait qu'un mot est plus qu'un mot, qu'il devient phrase, puis plus que phrase.
Je crois que tous les mots portent en eux l'encre pour les écrire. La seule question est de savoir dans quel ordre les mettre pour qu'ils se nourrissent les uns les autres, apaisant la faim de transmettre ce qui demeure, ce qui est en soi.
Des mots comme des tremplins où l'esprit rebondit de sourires en larmes, où rien n'est plus important que ce qui s'écrit entre chaque lignes. Sublime rien où tout se dit, ou du moins le principal.
Tout c'est peut-être exagéré, tout c'est tout, et c'est trop. Je ne crois pas que tout doit se dire, il faut savoir garder en soi. Garder comme un gardien, avec attention, sérieux, dévotion.
Juste dire ce qui libère et fait croire que l'on a une âme. Ca, c'est juste ce qu'il faut. Ecrire moins, c'est se blesser inutilement en détannant les années passées, en mettant ses nerfs à nus. Trop et c'est mensonge. Mensonge ou la réalité mêle sa toile au rêve, où les veuves noires sont accueillantes, où l'amour est assassin...

Mr Mick
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Post by Mr Mick »

C'est ainsi que le vois, que je le crois. Parler des pierres qui sont dans mon jardin c'est tenter ce que l'on ne peut pas. Tout les moulins savent que l'eau qui les anime n'a rien des pierres. Légère et de passage malgré son poids, l'eau seule sait pardonner, la pierre ne sait que taire et peser. Ecrire juste ce qu'il faut pour que la pierre se change en eau. Rien de moins, rien de plus.
Suprême prétention.
Et puis choisir par quelle pierre commencer, et puis la soulever. Peut-être pas tout de suite la plus lourde, il faut savoir ménager ses efforts. Ne pas commencer par les plus lourdes car peut-être je n'aurai pas à les porter en lignes. Juste décharger un peu, pour pouvoir avancer moins lentement, l'esprit plus léger d'envies, délesté de ces affects.
C'est tout cela, et tout ce que je sais, qui font que je vais écrire. Qu'importe d'être lu finalement, juste écrire par le besoin, pour son soulagement. Ecrire comme un demandeur d'asile passe les frontières. Tantôt de nuit, tantôt en rampant, tantôt en courant...
Ecrire pour pouvoir simplement marcher sur une terre offrant la paix à qui sait la mériter.
Tiens, je crois que je vais commencer par le début. Ne t'attends pas à une quelconque chronologie dans ce livre, la vie réveille et anime ses propres souvenirs. La vie passe et se fout du quand. Mais là, pour cette histoire, le début, c'est le mieux : L'enfance. Il paraît qu'elle détermine tout.
Alors merci à ce qui vient, car cela montre les biens cachés dans ce qui a été. J'ai tant de mal à les trouver. Souvenirs de Noël, d'anniversaires, de cochon d'Inde. Comme si mon esprit rongeait volontairement tous les bonheurs que j'ai dû connaître.
C'est nul les fêtes...
Peut-être qu'en fait, ce serait mieux de commencer maintenant. Après l'enfance, après les fêtes. Maintenant où les seuls rongeurs que je connais sont des bouffeurs de vie, des naisseurs d'angoisse.
Mais j'ai trop de mal à parler du présent. Le présent ne m'inspire pas. C'est vrai qu'en ce moment il n'est fait que d'attentes. Comme une sale grippe qui vous cloue au lit et vous oblige à remettre à trop tard l'envie du jour, l'envie des jours.
Des jours pour regretter les fièvres de l'enfance où les malades sont imaginaires et où Molière n'existe pas.




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Mr Mick
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Post by Mr Mick »

Quand j'étais indien, l'été dans la montagne, je portais chaque seconde. Mon temps m'appartenait, et sur mon pur-sang, je ne courais jamais contre la montre. Je ne m'étouffais pas encore à repousser ce que pourtant les années avaient déjà commencées à écrire, je croyais alors que le temps ne pouvait que jouer en ma faveur.
Je me sentais tellement rien dans ma tête d’apache, que seul l’espace pouvait m’offrir son anonymat. Les autres déjà m’étouffaient à faire semblant de mon existence. Comme si je ne savais pas, mon sixième sens d’indien aidant, que, finalement, j’étais appelé à faire pas de loup, à jouer l’agneau.
Et cet été là, l’agneau commençait à avoir les crocs qui poussaient. Il avait envie de vivre pour lui, de vivre fort. Il voulait goûter aux privilèges de l’enfance, trouver l’aventure et le frisson au détour de n’importe quel moment pour peu qu’il soit volé.
Mais mon troupeau, déjà, pendait mes précieux frissons d’explorateur aux potences des croquemitaines.


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Mr Mick
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Post by Mr Mick »

Je n'ai jamais eu peur du loup. Finalement, dans les contes que mes grand-mères ne m'ont jamais lus, le loup ne mange que ceux qui croient que l'on peut oser. Moi je pensais que rien ne pouvait me bouffer, sauf peut-être l'ennui ou l'envie. Cavalier émérite, à cheval sur mon rêve, j'attendais des ailes pour enfin voler ma vie.
Un jour où je parcourais mon territoire, j'ai découvert un bout de rivière que j'ai immédiatement conquis. Elle sortait en gémissant des ronces, déchirée à larmes blanches, pour disparaître un peu plus loin au détour d'un écran de fougères, dans un éternel plongeon brumeux. Je regardais les feuilles de marronniers qui se noyaient sous ses tumultes, et frissonnais à l'idée d'avoir à en cueillir une. Mais de toute façon, les belles squaws ne voulaient pas de mes fleurs et je n'avais pas encore à faire semblant.

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Mr Mick
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Post by Mr Mick »

Je connaissais tout près de ma rivière un rocher aux trésor, tout en quartz anobli, que j’avais plaisir à retrouver. Pour qu’il se laisse voir, il fallait être curieux et savoir le sentir par delà les genets. Il se découpait alors au soleil en facettes de saphir et offrait le spectacle de ses sortilèges lumineux avec l’insouciance d’un magicien débutant.
J’étais certain que c’était à son flanc que les mystérieux scarabées noirs venaient se découper une cuirasse bleutée. Je les imaginais qui fendaient son écorce en faisant naître des poussières azurées puis qui, une fois leur forfait accompli, soulevaient, triomphants, leurs mandibules pour rire une dernière fois à gorge déployée avant de monter au ciel vêtus de leur larcin, dans un bourdonnement menaçant. Ils m’inspiraient le respect et la crainte, moi qui n’ai jamais su briser un bout de ce trésor.

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